• 01 août 2023
  • Mis à jour le 01 août 2023
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  • Interview
Caroline Roger-Moigneu
Caroline Roger-Moigneu, vice-Présidente déléguée à l’insertion, à la lutte contre la pauvreté et aux gens du voyage

Le nouveau Programme Bretillien d’Insertion a été voté par l’assemblée départementale lors de la dernière session. Caroline Roger-Moigneu, vice-Présidente déléguée à l’insertion, à la lutte contre la pauvreté et aux gens du voyage, qui a porté ce schéma stratégique, a répondu à nos questions.


Quel bilan tirez-vous du précédent Programme Bretillien d’Insertion ?

Caroline Roger-Moigneu : "Le bilan du dernier Programme Bretillien d’Insertion est très positif avec un nombre d’accompagnements qui a augmenté, notamment par rapport à l’intégration de clauses sociales dans les marchés publics. Le nombre de clauses sociales est supérieur à celui qui avait été envisagé au démarrage du schéma. En 2022, à titre d’exemple, l’objectif était de 70 000 heures et il y a eu plus de 100 000 heures comptabilisées. Le Département est moteur sur les clauses sociales au niveau du territoire national. L’intégration de ces clauses sociales répond à un besoin des allocataires de reprendre le chemin du travail, et aussi des entreprises du territoire qui jouent le jeu de répondre à ces marchés clausés et qui y voient un réel intérêt, puisqu’elles recrutent par ce biais-là sur des contrats courts ou longs. Sur les sujets de mobilité, l’accompagnement du Département pour aider les personnes en précarité et en insertion augmente également fortement.

Autre exemple : les sollicitations à l’Info Sociale en Ligne (ISL) qui ont fortement augmenté. C’est un dispositif très spécifique à notre Département, unique en France, qui répond au besoin de la population d’avoir un interlocuteur en direct. En cela, ce service lutte contre la fracture numérique, est vecteur de lien social et contribue aussi à favoriser l’accès aux droits.

Le Fonds de Solidarité Logement (FSL) connait également une montée en puissance, avec davantage de demandes pour aider à l’accès au logement, mais aussi pour se maintenir dans son logement logement ou le rénover. En 2022, près de 7 millions d’euros ont été accordés au titre du FSL. Les personnes accompagnées peuvent avoir besoin d’une aide ponctuelle du Département sur le paiement d’une ou deux factures. Aujourd’hui, le contexte économique est tel, que nous avons des Bretilliennes et des Bretilliens qui sont des actifs précaires, qui travaillent en CDI à temps plein et qui ont besoin pour survivre d’avoir recours à l’aide sociale, à la banque alimentaire… Les situations de grande précarité augmentent. Les aides ponctuelles du Département et les accompagnements sociaux peuvent éviter de tomber dans des mécanismes de surendettement."

Quels sont les axes forts de ce nouveau Programme Bretillien d’Insertion ?

C.R-M : "L’un des axes forts de ce nouveau PBI va être l’expertise d’usage, qui consiste à dire que ceux qui connaissent le mieux la politique d’insertion sont ceux qui en bénéficient. Je souhaite associer davantage les bénéficiaires du RSA  à la co-construction de cette politique. Ce nouveau PBI va faire l’objet d’une évaluation dès son lancement, ce qui permettra aussi d’apporter des ajustements.

Ce nouveau PBI va également œuvrer à favoriser la mobilité, car il s’agit d’un frein majeur à l’insertion sociale et professionnelle pour les personnes accompagnées. On va continuer à les accompagner vers une mobilité inclusive et douce, lorsque cela est possible au niveau des territoires. Autre axe fort : l’instauration d’un revenu de base pour les jeunes majeurs sortant de l’Aide sociale à l’enfance et ne bénéficiant pas d’un dispositif existant. Et enfin, l’expérimentation France Travail sur le territoire Redon – Vallons de Vilaine, qui permet de défendre une vision politique d’accompagnement social et professionnel, plutôt que de sanction et de répression. Aujourd’hui, l’augmentation du nombre de bénéficiaires du RSA et notre souhait de lutter contre les exclusions nous oblige à réfléchir à un accompagnement de plus grande proximité, notamment en réduisant le nombre de personnes accompagnées par un seul référent RSA, de 250 à 50 personnes."

Quels sont les enjeux de l’insertion aujourd’hui en 2023 ?


C.R-M : "L’accès au logement reste essentiel, tout comme la mobilité, et notre accompagnement à ce niveau-là doit se poursuivre. Nous avons un axe fort d’accompagnement à développer autour des enjeux de santé physique et mentale. Il y a également un vrai travail à mener autour de l’accès au numérique et de l’illectronisme, qui ne touche pas uniquement les personnes les plus âgées. Et puis il y a des nouveaux enjeux qui s’affinent, notamment par rapport aux résultats d’une étude de 2021. Cette étude montre que 53% des bénéficiaires du RSA sont des femmes, 30% sont des familles monoparentales et près de 25% sont des jeunes de moins de 30 ans. Il y a des nouveaux enjeux, dont il va falloir qu’on se saisisse autour de la garde d’enfants et d’actions de soutien en faveur de la jeunesse. Un autre enjeu important consiste à changer le regard sur les personnes en situation de précarité. On ne vit pas au RSA, on survit. Lorsqu’on perçoit le RSA, on est en dessous du seuil de pauvreté."

Un meilleur accompagnement pour les allocataires du RSA

Le Département d'Ille-et-Vilaine agit pour la mise en œuvre d'un accompagnement pour les allocataires du RSA. Il partage plusieurs des propositions formulées dans le cadre de France Travail, et testées dans les expérimentations dans lesquelles il reste engagé :

La nécessité de favoriser une entrée rapide et dynamique dans un parcours d’accompagnement

  • L’importance d’un accompagnement progressif et renforcé
  • L’exigence de mieux coordonner les efforts des divers acteurs concernés
  • L’importance de rapprocher les professionnels de l’insertion et l’emploi avec le monde de l’entreprise
    Avec trois conditions essentielles et non négociables pour l'issue de France Travail : ne pas créer un "RSA sous condition" ; les heures d'accompagnement ne peuvent constituer un travail ou une activité obligatoire ; la responsabilité des parcours des allocataires doit demeurer une compétence des Départements.